Au Petit Saint-Benoît

Et si c’était un peu grâce à ce Petit Saint-Benoît qu’il restait encore un peu du grand Saint-Germain ? Connaissant la frénésie du quartier à cavaler derrière le veau d’or de l’hyper-luxe, c’est le genre d’affaire dont on redoute qu’elle ne soit transformée en un clin d’œil en boutique de prêt-à-porter ou en Starbucks. Mais non ! la petite brasserie de quartier née en 1901 survit vaille que vaille. Sa longue devanture en boiserie en atteste. Et une fois la porte poussée, tout respire la patine des ans. Avec meuble range-serviettes, miroirs piqués et vieux comptoir de zinc sans oublier les dessins à la gloire de l’affaire signés Prévert, Wolinski ou Sempé.

Longtemps dans la famille Gervais, la gérance vient d’être reprise par un véritable bougnat monté du Lot aveyronnais qui coule au pied du massif de l’Aubrac. S’il portait une robe de bure, Laurent Nègre pourrait – sans forcer le trait – évoquer un joyeux moine rabelaisien rythmant son service d’une voix à la fois grave et chantante de troubadour occitan.

Le bonhomme – qui s’y connait dans les bistrots anciens -il œuvre aussi à la Grille Montorgueil – a repris la composition des cartes plastifiées des années soixante. S’il a gardé quelques grands classiques : œufs mayo, soupe à l’oignon ou escargots, il est décidé à jouer la carte du frais et du saisonnier. Le nouveau patron -un peu chauvin comme tout bon Rouergat qui se respecte – a ramené quelques produits de son pays comme ce saucisson de Laguiole signé Conquet qu’il aime tendre pour le découper en grosses tranches.

Idem pour la viande d’Aubrac avec cet onglet à l’échalote servi avec des frites maison. Son velouté au choux-fleur façon Dubarry, parsemé de cerneaux de noix est sa madeleine proustienne, façon de rendre hommage à celui que sa maman lui mitonnait.

Si on ajoute à cela une équipe souriante et ne manquant pas d’à-propos, on comprend donc que la bonne ambiance règne ici. Riverains et touristes communient au rythme de leurs mandibules et des éclats de rires. La carte des vins avec ses vins d’indépendants reconnus, comme ce Walden en côtes du Roussillon soigné Bizeul ou ce Saumur signé Thierry Germain.

Parmi les desserts : le délicieux baba (13€) humecté à souhait ferait presque oublier la règle de Saint-Benoît « Prie et travaille». On pourra toujours filer à l’église Saint-Germain … pour s’en souvenir.

Formule 22€ le midi en semaine : plat du jour / dessert

Au Petit Saint-Benoît
4 Rue Saint-Benoît, 75006 Paris / 12h-14h30 : 18h30 – 22h30
Fermé le dimanche –