Roquefort fête les 100 ans de la première Appellation d’origine

Le 28 janvier, au Musée du Fromage (Paris 4ème), la Confédération Générale de Roquefort a lancé l’anniversaire des 100 ans de l’appellation d’origine Roquefort. 2025 sera ponctuée d’événements destinés à marquer le coup d’une date qui compte dans la longue histoire du « Roi des Fromages ». Plus que le camembert, le roquefort dont les premières traces écrites remontent à 1070, incarne la France au plus profond de ses racines… Puissant au goût et spectaculaire à l’œil, ce symbole gastronomique français a souvent été le premier à trinquer lors de guerres commerciales avec les USA comme celle du bœuf aux hormones. On verra quel sort l’administration Trump lui réservera…

Onze ans avant les premières AOC viticoles, c’est le 26 juillet 1925 pour le roquefort qu’une loi va poser les bases du premier label d’appellation d’origine. Elle est destinée à protéger des contrefaçons ce produit de terroir ancré dans l’histoire et dans un territoire autour d’un savoir-faire unique. Le concept juridique en France de l’appellation d’origine centrée autour de l’authenticité du produit va faire florès. Selon l’exigence du cahier des charges, l’AOC -devenue en Europe AOP- va prouver qu’elle peut assurer la survie de territoires et les protéger des vicissitudes de la modernité mondialisée et du productivisme sans limite.

100 ans plus tard, s’ils ne sont plus que sept producteurs de roquefort, leur cahier des charges demeure l’un des plus exigeants des fromages français. Son territoire se limite à  celui du « rayon de roquefort », sa brebis de race Lacaune est nourrie à l’herbe, au fourrage et aux céréales provenant à 80% de la ferme. Avec un pâturage obligatoire en période de disponibilité d’herbe. Le roquefort qui ne recourt qu’au lait cru s’affine  dans les grottes du Combalou dominant le village. C’est dans ses caves que le Penicillium roqueforti va créer ses veines bleues qui vont lui donner ce goût inimitable. 

Aujourd’hui, il s’agit coûte que coûte de relancer le roquefort à l’export autant que dans l’hexagone dont les ventes chutent (16 200 tonnes vendues en 2019, 14 400 tonnes en 2024). Les nouveaux modes de consommation qui ont explosé avec le Covid (apéro, snacking…) n’ont rien arrangé. Apprécier l’authenticité d’un produit réclame un peu de connaissance. Tout comme le vin rouge, lui aussi chahuté, le roquefort est confronté à un manque de transmission des savoirs, lié en partie à l’évolution sociologique. Le formatage des jeunes palais par le sucre omniprésent dans la plupart des produits agroalimentaires ne favorise pas non plus l’approche même si, au fil des décennies, les roqueforts se sont faits plus doux. Ainsi la campagne de pub de la Confédération « Roquefort – Pour toujours au goût du jour » avec quatre visuels de plats quotidiens accueillant le roquefort pourra séduire des consommateurs plus jeunes. Mais verra-t-on McDo ou Burger King glisser une tranche dans leurs burgers comme ils le font avec le cantal ? Peu probable. Il y a malheureusement fort à parier qu’une telle authenticité gustative française leur fera peur …

En restauration : jouer l’alliance éternelle avec le vin

Dans les fourneaux avec ses saveurs intenses, le roquefort continue d’être une source d’inspiration sans limite pour les chefs et  leur permet de multiples recettes innovantes et des accords audacieux sans tourner le dos au sucré-salé. En salle, le roquefort a eu tendance à disparaître comme le plateau de fromages. Pour Xavier Thuret, MOF fromager de Lactalis, le remède à cela est de le mettre dans les mains des maîtres d’hôtel et des sommeliers. «Car aucun fromage n’appelle autant le vin que lui et pour l’avoir testé, j’ai mesuré à quel point une petite tranche de roquefort pouvait augmenter significativement le ticket vin d’un restaurant. »