La Traversée de Paris

Impossible d’oublier le nom de ce troquet installé rue Poliveau au n°45 précisément, adresse fétiche ancrée dans les mémoires par les clameurs poussées par Jean Gabin pour faire céder le cupide charcutier Jambier ?

Mais les patrons de La Traversée de Paris ne sont pas comme ceux du film. Mesquins, rances et aigris. Au contraire, c’est un trio Sri Lankais accueillant et chaleureux.  Thushy, arrivée en France quand elle avait trois ans, a travaillé dix ans « chez les Costes » rue de Rivoli au Sanseveria. Son frère Thushan assure le service au bar. Quant à son mari Shiam, débarqué dans l’Hexagone en 2002, il a grimpé les échelons de la filière néo-bougnate de Paname. D’abord comme plongeur dans une affaire du 15^e. Il a ensuite appris la cuisine dans deux cafés du 18^e, au Relais et au Brio. C’est une célèbre maison de vin et de café d’origine aveyronnaise qui leur a mis le pied à l’étrier pour les aider à se lancer comme cela s’est fait pendant des décennies avec des générations de jeunes bougnats montés à Paris faire bistrot. Comme quoi il n’est plus forcément obligatoire d’être natif d’Aurillac ou de Laguiole pour avoir sa première gérance. On peut être originaire de Colombo et faire des étincelles dans le bistrot.

Pour autant, l’installation du couple dans cette Traversée de Paris n’a pas été une histoire à l’eau de rose. «Du fait de notre couleur de peau, les débuts ont été très très durs, tous les clients avaient déserté le bistrot, on avait l’impression qu’on leur faisait peur. Nous avons vraiment été proches de laisser tomber» confie Thushy.  «Avec le Covid et la vente à emporter le contact s’est finalement fait avec les habitués du quartier et la confiance a pu s’installer.» La Traversée de Paris est à nouveau au centre de ce petit « village parisien», tapi derrière le Jardin des Plantes avec ses habitués au comptoir et à table et une bonne ambiance familiale. 

Aux fourneaux, Shiam joue une partition culinaire bistrotière juste qui régénère et qui rapproche sans tralala le cœur de l’estomac. A prix démocratiques. De l’omelette nature salade (10,80€) au fish and chips de cabillaud (14,80€), en passant par le tartare frites (16,80€). Par quel mystère ce troquet va-t-il jusqu’à faire un détour par la Nièvre ? Car cela intrigue quand la maison sert des coteaux du giennois du Domaine des Athénées pour arroser des crapiaux du Morvan. Ces petites crêpes ne courent pas les rues. Elles imposeront à certains une traversée de Paris s’ils veulent se les mettre sous la dent… 

La Traversée de Paris

45 rue Poliveau, 75005 Paris
Tél. 01 71 32 65 31
Ouvert tous les jours – ferme à 20h
E+P ou P+D = 15,80€