L’instinct partagé, nouvelle devise des AOP languedociennes !

« L’instinct partagé ». C’est la nouvelle signature choisie par le Comité Interprofessionnel des Vins du Languedoc (CIVL) pour la « com » de ses 23 AOP et dévoilée à Paris lors d’une conférence de presse le 17 juin.

La nouvelle devise est, explique-t-on au CIVL, le résultat d’axes identitaires qui ont émergé au fil de dizaines d’entretiens avec différents acteurs du vignoble. Il y a la nature, l’énergie, la liberté mais aussi la spontanéité comme l’insoumission … De quoi faire faire ronronner d’aise un Jean-Luc Mélenchon même si ces insoumis languedociens puiseraient davantage leurs racines dans la grande révolte des vignerons du Midi de 1907.

Qu’il est loin le Languedoc flagellant ! On ne reviendra pas sur la révolution culturelle qui s’y est joué ces trente dernières années. Néanmoins difficile de ne pas songer à la phrase du frondeur Cardinal de Retz : «On ne sort de l’ambiguïté qu’à son détriment. » Tant, en l’espèce, cette tentative d’une synthèse languedocienne séduisante en deux mots expose à des contradictions.

Pas facile en effet de rassembler sous une même bannière vins « premiums », vins d’auteurs, vins nature et vins formatés de façon quasi-industrielle ou vins de cépages. Ce vignoble, grand comme un pays, a de quoi faire perdre leur latin œnologicum aux pontes de l’INAO et donc a fortiori aux novices bachiques. Ainsi en va-t-il quand on tombe sur des cuvées classées vins de France -ex-vins de table- valorisés dix fois plus que bien des AOP. C’est peut-être là que réside une des causes du symptôme, relevée par la présidente du CIVL, Miren de Lorgeril (Château de Pénautier). «Si la fidélité des passionnés aux vins du Languedoc est présente, nous ne sommes pas suffisamment connus de manière élargie. »

Reste toutefois des signes particuliers qui le distinguent aux yeux des consommateurs à commencer par de très bons rapports qualité/prix, des négociants audacieux et des profils de vins qui prennent en compte le réchauffement climatique et s’efforcent de gommer les côtés brûlants et confiturés qui furent la marque de bien des rouges pendant un certain temps.

Justement, en cet été post-covidien, le Languedoc marque des points sur le rosé. Les ventes explosent. Il est vrai que bien des rosés languedociens ont pour eux d’être aimables et surtout, ici aussi, bien meilleur marché que leurs homologues provençaux.

Au-delà des consommateurs, cette mise en avant d’un « instinct partagé » a aussi pour but implicite d’attirer les candidats à la reprise de vignes. Car 30% des vignerons languedociens devraient partir à la retraite dans les cinq prochaines années. Gigantesque défi que leur remplacement. Alors cet « instinct partagé» séduira-t-il des candidats à la reprise d’arpents languedociens souhaitant ardemment devenir des acteurs de cette « nouvelle scène viticole française » pour reprendre le mot de Mirem de Lorgeril ? C’est tout le bien qu’on peut souhaiter à ce grand vignoble.