Psychodrame à Tradition du Vin, pas de Bouteille d’Or en 2025

Il n’y aura pas de remise de la Bouteille d’or en 2025. Le 17 décembre dernier, aux termes d’une réunion extraordinaire -et houleuse- du bureau, Nicolas Decatoire, président depuis trois ans de l’association Tradition du Vin qui remet le trophée, a rendu son tablier. Il n’a pas été remplacé. L’info secoue le landerneau bistrotier. Car la Bouteille d’Or est avec la Coupe du Meilleur Pot l’un des deux trophées du métier les plus respectés, de ceux qui entretiennent avec ferveur le feu bistrotier à Paris depuis des années.

Les membres du bureau de l’association se sont déchirés sur le choix du futur récipiendaire. Pas question pour Nicolas Decatoire de retenir A Tour Eiffel, café d’angle du 15e devant l’église du Commerce qui semblait tenir la corde. Il prêchait avec d’autres pour deux établissements du 16^e, dont le Bistrot Paul Chêne, rue Lauriston. 

Pourquoi le choix de A la Tour Eiffel (Paris 15e) n’a pas plu à Nicolas Decatoire ? «Ce n’est pas un Bistrot, mais une Brasserie. Je n’ai rien contre son patron mais il ne connaît rien au vin. Il n’a jamais vu un vigneron». Pas question de cautionner une telle affaire pour lui qui martèle d’abord l’engagement des patrons de Tradition du Vin pour les vins de vignerons. 

Son de cloche opposé du côté de Paul Calvet, ancien président de l’association et partisan de A la Tour Eiffel qui reproche à son successeur de choisir des affaires qui sont, à ses yeux, des restaurants et non des bistrots car il est impossible d’y déguster un vin sans manger. «Je comprends que certaines affaires puissent fermer l’après-midi, mais quand elles ouvrent, il faudrait qu’on puisse y déguster un verre de vin sans être obligé de consommer un repas.» Et de citer le bistrot Bouteille d’Or de cette année ( Oh Vin Dieu Paris 8-NDLR) «Quand je m’y suis rendu, on m’a carrément « conseillé » d’aller manger à côté, ce que j’ai fait. Cette année encore dans l’un des deux pressentis -près de la Maison de la Radio- on m’a dit qu’il faut prendre un repas pour boire. » Ce que Paul Calvet semble regretter, c’est la fin du patron qui faisait goûter sa dernière trouvaille au comptoir. Lui qui est d’origine aveyronnaise confie aussi avoir ressenti de la part de Nicolas Decatoire un ras-de-bol contre l’origine « auvergnate » des « vieux » membres de l’association soupçonnés de pousser l’un des leurs. Alain Lac, le patron d’A la Tour Eiffel est en effet d’origine rouergate. 

Une chose est sûre, la controverse révèle une fois de plus les pièges de l’ambiguïté du mot bistrot et ce que les uns et les autres mettent dans ce terme.  Du bistrot ou de la brasserie populaire contre le bistrot chic épanoui dans un Paris en voie de gentrification. Elle tient aussi de la querelle d’anciens et de modernes. En tout cas, l’affaire révèle un Paris de la restauration en pleine évolution.