Arnaud Rousseau, un agro-industriel à la tête de la FNSEA

En succédant à Christiane Lambert, pugnace éleveuse de porcs du Maine-et-Loire, comme président de la Fédération nationale des syndicats d’exploitants agricoles (FNSEA) Arnaud Rousseau incarne le retour de l’agro-industrie à la tête du premier syndicat agricole.

Ce céréalier de Seine-et-Marne qui gère une exploitation familiale de 700 ha plantés en colza, blé et maïs est aussi un industriel. Il a succédé à Xavier Beulin, ancien patron de la FNSEA décédé en février 2017, à la présidence du groupe Avril. Ce géant agro-alimentaire réalisant près de 7 milliards d’euros de chiffre d’affaires est spécialisé notamment dans le colza, les huiles (Puget et Lesieur) mais aussi dans les agro-carburants, la nutrition animale et la chimie. 

Pas sûr se dit-on alors que le paysan du Gers en polyculture ou le maraîcher du Vaucluse ait les mêmes problématiques… Tiendra-t-on compte de l’agriculture en zones de montagne et les prairies permanentes permettant le maintien des paysages, de belles races à viande et d’une production laitière qui tend ces derniers mois à s’effondrer alors que s’amplifie les conversions vers les céréales…L’entourage du nouvel homme fort de la FNSEA assure qu’il écoute et qu’il a une vision transversale de l’agriculture. Et le Figaro du 29 mars de citer le brie de Maux dont le cahier des charges de l’AOP inclut dans la ration des vaches de la pulpe de betterave. Soit…

Etat dans l’état pour certains, la FNSEA est puissante avec des multiples tentacules et même un groupe de presse. Les ministres de l’agriculture ne font rien sans son aval dit-on. En août 2020, à la grande satisfaction d’Arnaud Rousseau alors vice-président de la FNSEA, le ministre de l’agriculture, Julien Denormandie, était revenu sur l’interdiction des néonicotinoïdes – tueurs d’abeilles-  pour les betteraviers. La Cour de Justice d’UE avait statué contre cette dérogation en janvier 2023 suscitant une manifestation à Paris des betteraviers franciliens et nordistes.

La FNSEA déploie un discours bien rôdé. Du « il faut nourrir le monde » on est désormais passé à il faut « assurer la souveraineté alimentaire française». Mais à quel prix ? se demandent certains observateurs critiques ? Des terres appauvries, des populations d’oiseaux et d’insectes en chute libre ? 

C’est le drame d’une agriculture française dont il semble impossible d’assurer une synthèse faisant progresser de concert efficacité économique, respect de la nature, biodiversité et bien manger… Quelques jours après la manif désastreuse contre la méga-bassine de Sainte-Soline, reste à croiser les doigts que l’arrivée nouveau président de la FNSEA n’amplifie pas le clivage qui déchire la terre de France. Entre les dérives violentes des « zadistes-anars » ou celles de l’agro-industrie n’y-a-t-il pas une troisième voie ?