On ne tombe pas sur cette adresse par hasard. Auberge hors-du-temps plantée en cette rue Croulebarbe -qui l’est autant…- derrière les Gobelins. Sa devanture de vieux cabaret flanquée d’un hôtel et d’une boulangerie intrigue déjà. Elle abrite depuis des décennies une ambassade basco-béarnaise.
Les habitués y reviennent chaque semaine. D’autres, chaque demi-siècle…«C’est ici qu’on s’est mariés… je voulais voir si l’endroit existait encore…» Bingo !
La porte poussée, on tombe sur une toile du Cabaret de Mme Grégoire du XVIIIe siècle. En son temps, Victor Hugo a ici levé son coude. L’endroit et l’hôtel annexe du Vert Galant sont dans la même famille depuis 57 ans. De fait, il aura fallu du temps à Dominique Laborde qui a succédé à son père décédé en 2006 pour digérer l’affaire et assumer ses changements. Ainsi quand elle a fait enlever le vieux papier peint, certains clients ont frôlé le collapsus. Elle a pris une artiste pour repeindre les même motifs floraux, gardant l’esprit mais l’allégeant. Ce qu’elle a fait aussi d’une certaine façon pour la cuisine.

Après le départ de son chef historique qui travaillait ici depuis 33 ans, elle a contacté le chef bistronome Philippe Tredgeu. Fut-il béarnais, la secousse fut d’amplitude…«Certains clients ont adoré, d’autres ne s’y retrouvaient plus. Je sentais deux forces s’opposer derrière les fourneaux : le poids de la tradition de la maison et la créativité du chef qui ne ne pouvait se limiter au répertoire cassoulet/axoa. » En octobre 2018, Philippe Tredgeu a rejoint le Violon d’Ingres de Christian Constant mais son passage aura permis à Dominique Laborde d’assumer pleinement son rôle de gardienne de l’âme du lieu.
Et surtout, d’imaginer une simplification de la carte restant fidèle à l’esprit de cette auberge basco-béarnaise sans jamais tomber dans le lourd rustique. A l’exemple de ce croustillant œuf mollet bio, piperade et lard grillé (10€) ou ces chipirons farcis à l’encre de seiche et au riz vénéré (20€) puissant comme une tempête sur le Golfe de Gascogne. Quand à l’axoa, il est recouvert d’une purée mousseuse. Pour les fournisseurs, la patronne puise aux meilleures sources : Irouleguy d’Abotia, canard de la ferme Jean Sarthe à Saint-Orens, charcuterie Ospital…
C’est au dessert (10€) qu’il faut définitivement choisir son camp. Entre le Béarn et son Estirat de pommes rôties recouvert d’une boule de glace aux pruneaux à l’armagnac ou le gâteau Basque… La patronne basque par la mère et béarnaise par le père, ne risque pas de froncer les sourcils.
L’Auberge Etchegorry –
41 rue Croulebarbe, 75013 Paris – Tél : 01 44 08 83 51
Métro : Place d’Italie ou Corvisart
Menu Midi 18 € entrée-plat ou plat-dessert
Menu découverte 36 €