Salon de l’Agriculture : 2023, l’année charnière…

Le Salon de l’Agriculture est un peu comme Ikea ou le bistrot du coin. Il attire différents publics qui se côtoient rarement. Ruraux, banlieusards, professionnels de l’agroalimentaire, franciliens et ultramarins s’y croisent et parfois échangent.

Aux yeux de certains, le Salon, avec ses moissonneuses-batteuses larges comme une autoroute et le stand Mc Do, a longtemps donné l’image d’une agriculture dominée par un modèle de production orienté vers le volume. Le tout s’articulait autour d’un slogan, « il faut nourrir la planète». Aujourd’hui, l’axe réthorique tournerait davantage autour du « maintien de la souveraineté alimentaire française.» 

Ces dernières années, la protection de l’environnement et de la biodiversité a  en effet bouleversé la donne. Avec  des remises en question parfois difficiles. A l’exemple des betteraviers privés de néonicotinoïdes qui ont récemment manifesté à Paris contre un Etat qui, selon eux, est le seul à leur imposer de telles contraintes quand la concurrence étrangère n’y est pas astreinte… Sauf à oublier le risque d’un monde sans insectes qui signerait leur fin. Et la nôtre…  D’ici peu, les céréaliers ne pourront plus recourir au S-métolachlore, un herbicide susceptible de contaminer l’eau potable…

Justement, en cet hiver sec comme un muscadet d’antan, l’eau est au centre des débats. Les contestations autour des projets de « bassines » se multiplient. Quand d’autres préconisent  le recours à des varités moins voraces en eau que le maïs, telle que l’orge ou le sorgho.

De fait, l’entrée en vigueur de la nouvelle PAC (2023-2027) plus verte va entraîner quelques changements profonds. Ainsi devrait-elle permettre aux producteurs bio de percevoir davantage de primes que ceux en HVE ( Haute Valeur Environnementale) certification défendue par la FNSEA. De même, les rotations de cultures chaque année devraient alléger la charge en produits chimiques et soulager les sols. L’entrée en vigueur de cette PAC ne va pas de soi. Certaines  préfectures comme celle de Toulouse ont reçu leur lot de purin ces dernières semaines…Ces nouvelles mesures font aussi craindre aux agriculteurs davantage de normes et de paperasses. Avec des circonstances aggravantes pour les viticulteurs, où s’ajoutent les contrôles des douanes sur les alcools.

Ajoutez à cela l’envolée du prix des matières premières. A commencer par le carburant- qui pèse sur toutes les professions ou le stress lié à la variabilité des cours. Le blé en hausse, le porc en baisse…

Comme dans d’autres secteurs, le manque de bras va devenir criant. La moitié des agriculteurs – soit environ 400 000 personnes- devrait partir à la retraite d’ici 2030. Les reprises tentent moins les jeunes – même ceux qui sont fils d’agriculteur-  qui parfois succombent aux « sirènes » de la ville, telle une Sandrine Rousseau prônant le « droit à la paresse » . La député écologiste ne craint pas la contradiction  ou méconnait la terre car qui dit bio suppose un sérieux surcroît de travail…Mais qui se soucie des heures travaillées par les paysans ? Et particulièrement de nombre d’ exploitations laitières en voie de disparition ou de réorientation vers les céréales ?  

La concentration des exploitations agricoles n’est donc pas prête de s’arrêter. Et l’image d’Epinal de la ferme familiale en polyculture va devenir une pépite rare à côté des exploitations géantes truffées de technologies pour remplacer l’humain…

La guerre en Ukraine accélère la méthanisation de l’agriculture. La fin des livraisons de pétrole et de gaz russe a accéléré le redéploiement vers des énergies renouvelables. Entre solaire, éolien et surtout méthanisation -grâce à leurs résidus- les agriculteurs comptent parmi les principaux acteurs de cette transition énergétique. Ces nouvelles énergies vont assurer d’autres sources de revenus aux agriculteurs.